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 Il y a tant d’années que je voyage sans partir sans prendre le train, ni l’avion.

Mes déplacements se font en auto, et la mer

- seul mon regard dans ses eaux voyage -

Aujourd’hui, tout à coup, me prend l’envie de m’en aller, de vivre au dehors de ma maison, d’explorer les lieux et les temps qui me sont inconnus.

J’ai vécu longtemps au-dedans de moi-même, en dehors du temps.

J’ai lu, écrit ; j’ai peint, j’ai façonné la terre, j’ai marché sur mes chemins mais ai-je jamais réalisé quelque chose d’étonnant ?

J’ai vu des choses dans la nuit qui sont devenues familières à mes insomnies, qui disparaissent avec le jour, ne laissant que de vagues sensations. Des angoisses, des peurs ; fantômes s’agrippant aux heures jusqu’à épuisement.

La lune me regarde et ne bouge pas. Que pense-t-elle de moi, de ce monde qui va bien ou mal, le sait-on ?

La lune n’est pas bavarde, elle nous contemple et c’est tout.

 

 

Je n’aime pas dormir la fenêtre ouverte, à cause du bruit de la nuit ; il traverse les rideaux et s’impose, c’est idiot !

Alors, je ferme la fenêtre et le ciel et la mer se marient dans mon lit.

Je m’endors.

Bonjour le matin, c’est hier - Jour ancien, disparu -

Y penser, agissement saugrenu ; il faut lutter avec le jour ; il faut regarder le soleil et plonger ses yeux dans le ciel.

Il faut boire le vent, respirer la mer et parler avec un ami.

Il faut rêver !

 

 

Apprendre ! Le monde entier à ses genoux. Acheter ou bien vendre ; des choses qui nous semblent importantes.

Se détendre - Le travail dure tout le jour et fatigue qui ne peut entreprendre.

Savoir mentir - La réalité nous impose de courir, manger et boire pour survivre et oublier ce qu’il advient de la main qui attend demain.

Rire et pleurer - La bouche et l’œil sur un visage me parlent plus que les journaux du monde entier.

 

 

Je veux partir mais où aller ?

Telle est la question qui s’impose avant tout recommencement.

Réfléchir, réfléchir mais pas trop longtemps afin de ne pas oublier le désir.

 

 

J’ai écrit des mots à la main pourquoi, pour qui ?

Le besoin de faire avant que demain ne s’empare de mon devenir et me plonge dans l’oubli.

Un mot placé tout près d’un autre pour faire sens pour exprimer l’indicible, pour chercher le sentier qui mène à soi-même. Trouver, qui sait, une bribe de vérité, un sentiment d’éternité.

Parfois des blancs s’inscrivent sur la page ; qu’a donc l’encre à rester dans son encrier ?

 

J’ai pris le train, j’ai pris l’avion

et le bateau

il y a longtemps

Depuis des années sans mystère je reste à terre.

Mon corps, dis-je, car mon esprit toujours se meut dans l’atmosphère.

Lier mon corps à mon esprit, est-ce une mission impossible

est-ce un vœu pieux

inanité

ou une étrange volonté ?

 

 

Voici la lune et ses étoiles

et un morceau de nuit à vivre

debout

à contempler les heures qui passent.

Je préfèrerais le tangage d’un bateau ayant pris le large

la direction de l’Argentine ou du Brésil

Buenos Aires Bahia Cordoba

Ushuaïa…j’en voudrais voir les beautés ; il me faut suivre cette idée

attendre l’aube et sa clarté.

 

 

J’ai peint des visages qui me ressemblent, parfois des masques au regard qui tremble, des paysages où ne vivent pas les gens.

J’ai fait des esquisses et des ombres, j’ai passé des heures sans nombre à dessiner, à écrire des lettres, à parler seule entourée de mes livres, de mes objets, du monde qui m’est familier et me rassure.

J’ai passé des heures à me faire croire que je pouvais être éternelle.

 

 

Les oiseaux plongent dans la mer - en cherchent-ils le mystère ? -

ils ont le plumage luisant qui éparpille

des étincelles à la crête des vagues

sous le soleil et quand il pleut leurs plumes

se fondent dans le bleu de l’océan.

 

 

Ne rien faire quand le temps est long ; penser aux jours à venir, aux jours du prochain voyage.

Ne pas savoir choisir la destination, se perdre en hésitations et dans la chaleur lourde et pesante finalement s’endormir.

 

 

Me voici sur un bateau qui tangue entre deux mondes opposés : le monde ancien que je viens de quitter et le nouveau qui m’attend à la dernière halte du bateau.

La côte déjà s’éloigne, les falaises s’enfoncent dans le lointain, je les vois peu à peu disparaître, puis je tourne la tête vers mon avenir.

Autour de moi, le monde vit ; des gens de partout que je ne connais pas.

Une vieille femme seule porte un chapeau blanc et me regarde. Voudrait-elle me parler ? Mon regard s’éloigne d’elle et parcourt l’espace sur le pont que la plupart des voyageurs ont déserté.

Les chaises vides sont alignées, trop bien rangées. La vieille femme s’en est allée pour se reposer sans doute ; je suis seule accoudée à la rambarde. Alors je vois :

Un château fort monte la garde du haut du roc sur la vallée

sur les toits du village en bas

sur le fleuve aux méandres verts

et sur les gens.

Qu’a-t-il à prendre cette posture hautaine ? Est-ce la fierté d’avoir vécu au-delà de longues époques passées ? Ou bien enferme-t-il l’âme de ceux qui sont passés sur le pont-levis de ses flancs et que le temps aurait damnés ?

Derrière, je vois 

les nuages s’amonceler… L’orage menace derrière les tours, le ciel s’assombrit et s’empare de la silhouette du château qui disparaît sans crier gare.

Je me retrouve sur le bateau

le bateau qui tangue entre deux mondes opposés et me transporte.

 

 

C’est une belle aristocrate, elle ressemble aux femmes qui posaient dans les magazines des années trente. Les années folles , paraît-il.

Je l’ai rencontrée dans la salle du bar, elle était accoudée au comptoir.

De longues jambes juchées sur des talons, croisées comme des aiguilles à tricoter lui donnaient l’allure d’un mannequin.

Immobile, elle tenait dans sa main un verre qui semblait contenir du jus d’orange.

Elle portait un chignon noué au sommet de la tête et souriait à l’homme, près d’elle,

qui lui faisait la conversation.

Un homme insignifiant, petit, à belle carrure pourtant mais dont le visage n’exprimait rien

qu’un air morne et las.

 

 

Sur le bateau, le temps disparaît. Sans les repas qui ponctuent la journée, le corps s’abandonnerait à une espèce d’engourdissement, et l’esprit se perdrait dans une rêverie proche de la vacuité.

Je parle pour moi qui ne m’intéresse à aucune des distractions proposées pour faire échec à l’ennui.

Je passe la majeure partie de mon temps à regarder la mer, accoudée au bastingage, à me reposer sur le pont, à lire, ou à observer les gens ; ce qui est peut-être l’occupation la plus distrayante.

Je pourrais écrire ou dessiner mais je n’en ai pas le courage ; il fait trop chaud et j’ai envie d’autre chose.

 

 

La mer est bleue

immensément bleue

insolemment bleue, tellement

qu’elle en est incongrue.

Et par-dessus la mer, le ciel qui, comme la mer,

nous assène son immensité outremer.

 

Il n’y a rien à dire, rien à faire

face au ciel, face à la mer

sur un bateau qui vous emmène vers les tropiques.

 

 

Des trompe-l’œil ! Dessiner des trompe-l’œil !

C’est ce que j’ai voulu faire par instants dans le passé et que je n’ai jamais fait. Oublié ! On ne peut pas tout faire. Dommage ! Faire illusion de cette manière m’aurait bien plu.

Jouer avec la réalité, faire comme si, faire semblant comme les enfants…

 

Cette nuit je n’ai pas dormi.

Les heures passées sont revenues me visiter, me harceler, me tarauder.

Ai-je bien fait de m’en aller ?

Des poèmes me sont revenus à l’esprit, des poèmes que j’ai lus lorsque j’étais à terre :

« Quel endroit plus propice

que le bord de la mer pour entrevoir l’univers 

Partir…En est-il besoin 

Quel est le devenir de ceux qu’attire le grand large 

Ont-ils devant les yeux plus que leur propre vie 

Et le ciel s’ouvre-t-il parfois quand ils lèvent les yeux ? »

 

Et puis j’ai pensé à ce que j’ai lu, à l’opposé :

« Que ne t’ai-je prédit un avenir de délices

Tu aurais su que la glace se brise sous le pas qui hésite

- Je voulais parcourir le monde, m’as-tu dit, vivre des milliards de secondes

loin d’ici mais je me suis perdu dans la ronde

des folies que procure la vie.

Je n’ai pas osé me déprendre des habitudes qui nous tiennent.

Entre lâcheté et turpitudes j’ai balancé.

Après toutes ces années sans un regard pour l’oiseau,

je rêve de découvrir mon visage au creux de l’eau. »

 

Alors, j’ai regardé les étoiles et il m’a semblé que leur éclat envahissait le ciel et éclaboussait l’eau d’étincelles, que j’y pouvais voir mon reflet.


 Le soleil se couche d’abord tout doucement, il prend son temps. Rien ne bouge et pourtant.

Fermer les yeux une seconde et le soleil déjà brûle l’horizon et hypnotise le regard. Le ciel dilue ses feux dans les flancs de l’océan et la nuit soudain épouse le crépuscule.

 

J’ai pensé, pensé et ressassé des choses. En avait-elles de l’importance ? Puisque je suis partie et les ai abandonnées comme de vieilles reliques sans valeur.

Que deviendront tous ces objets que j’ai laissés dans la maison, si je ne reviens pas…et même si je reviens ; il faudra bien qu’un jour ils vivent leur vie sans moi.

Finiront-ils dans une brocante ? Seront-ils vendus aux enchères ? Eparpillés de toute façon, à moins qu’une de mes anciennes connaissances n’en ait pitié, en souvenir de moi.

Et tout ce que j’ai écrit, tracé, modelé et que je n’ai pas emporté. Qu’adviendra-t-il de tout cela, si je ne reviens pas…Et même si je reviens. Distribué  à la postérité ? Enfermé dans un tiroir ? Brisé, cassé, effacé par la poussière !

 

 

La belle aristocrate m’a souri. Son compagnon pour une fois n’était pas avec elle. Je me demande si elle s’ennuie. Il ne semble pas pourtant.

Ses jambes sont toujours aussi longues. Tous les hommes la regardent ; elle n’y prête pas attention ; le regard noyé dans la mer quand elle est sur le pont ou perdu dans le miroitement des lumières, le soir, dans la salle du bar.

 

 

Il fait froid. Il fait nuit. La pluie m’a glacé le dos. Il faisait si lourd que je ne suis pas rentrée dans ma cabine quand la tempête s’est levée. Je suis restée debout à regarder les vagues s’agripper aux flancs du bateau. Quelques personnes ont fait comme moi. Maintenant, je suis seule ; la nuit est lourde de nuages dans un ciel inquiétant. Pourtant, je suis sereine. La pluie a tué la touffeur de l’air, je vais pouvoir dormir.

 

 

C’était au mois d’avril, le mois d’entre les saisons, le mois parfois encore malmené par les affres de l’hiver mais porteur des plus grandes espérances de vie.

Je suis en Allemagne, en vacances dans la vallée du Rhin, avec mon ami, mon compagnon de toutes les heures.

Une halte, une parenthèse apaisante, échappée hors du quotidien.

Le fleuve vert et majestueux se prélasse, sans se soucier le moins du monde des guetteurs perchés sur les rocs, au détour d’un méandre.

Le fleuve est lent, transporte péniches et bateaux de croisière ; le fleuve est vaste et emporte l’esprit dans les frémissements de son grand corps de voyageur immobile.

Rien ne le presse, il suit son cours de long fleuve tranquille jusqu’à la mer, sa compagne, dans l’immensité et je m’en vais avec lui, oublieuse de mon ami qui, je le sais, me contemple et sourit.

.....

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