Le silence prend tout l'espace
Le silence prend tout l'espace
Un calme vaste et ample
comme les épaules larges
sur quoi l'on se repose
vibre au son des voix multiples
de nos vies antérieures .
Que vienne l’ardeur du soir et de ses parfums d’encensoir !
Tu te pares comme la lune pour charmer ton bien-aimé.
Femme échappée de la terre, tu voyages dans les brumes
du mystère des silences, des plis de l’onde, des branches.
Ton cou évoque des rivages aux grands ciels déployés
un iris sur tes seins, plus que perle en un collier, pousse jusque
à tes reins la verdeur de l’été.
Tes saisons sont affiliées aux premiers jours de l’année
saisons pleines de tes hanches, à ta taille arrimées.
Ne parle pas, le silence vaut mieux que le dur calame
qui griffe la feuille blanche et le cœur des oubliés.
Ecoute la vague lente et le pas sur l’escalier des heures pâles
et des nuits blanches qui blessent ton bien-aimé.
Et offre à la nuit pleine ta coupe de senteurs vermeilles, des charmes
et de perles nées de tes mains
Pour que s’enivre au matin le cœur de ton bien-aimé.
Ont-elles peur, ont-elles froid?
Y a-t-il des ombres cachées dessous leurs toits,
des figures humaines qui les hantent?
Des senteurs, parfums d’extase, arômes épicés, effluves exotiques
s’épanouissent en bouquets invisibles jusqu’aux sommets
toujours plus hauts...
Toile de fond noire sur nuit bleue -
Un silence tragique
après les débris de l'orage
s'enorgueillit du temps qui passe
L'an proche arrive
Inconnu penché sur sa canne
et dont l'ample manteau de métal
offre aux regards
des brisures d'éclats de lumière
L'espace est devenue charnière
entre deux époques guerrières
Les arbres se cassent
et les toits tombent
Le vent nous frappe avant que l'onde
ne nous transporte
sur les rives de l'autre monde -
- Je t'apporte -
Je t'apporte mon sommeil cueilli au bord du Nil
quand la barque de Rê effleure le fil de l'eau,
et quelques souvenirs fleuris pendant la nuit
qui vit naître l'astre roi au cri du batelier -
Je t'apporte ma voix aux paroles nouvelles
échangées par les reines dont l'une est magicienne,
et quelques amulettes pour guérir ta peine
que je fis naître jadis au bord de ma douleur -
Je t'apporte le temps brandi sur mon chemin
par des mains inspirées et des regards divins,
et quelques lignes tracées sur un vieux parchemin
pour te dire la vie qui nous vient de très loin -
Je t'apporte le vent rencontré le matin
au milieu du marais de la mélancolie -
J’y ai puisé la force
d'avancer pas à pas
jusqu'à nos lendemains -
Un dimanche après-midi au jardin
L'encre de tes paroles m'inonde de soleil
Je brille à ton reflet comme un éclat de verre brisé
Et le soir qui s'allonge au creux des vagues
longues murmure des mots timides et parfois insensés.
Je plonge au fond de ton regard écartelé
tu te penches jusqu'à mon cou immense
je frissonne et tu penses
et ta pensée perdue s'anime à mon regard
Mes hanches s'arrondissent
sous le feu noir qui sourd
du contact naissant de nos désirs mouillés.
Paru dans: Anthologie de la poésie contemporaine
Giovanni Dotoli Editions Hermann 2011
Ouvrir les cahiers au vent de mon humeur et des sens
Travailler comme le semeur mon désir de voir germer
au printemps
quelques brins d'éternité.
Ramasser la feuille d'érable tombée au pied du grand arbre
Elle meurt si je n'y prends garde mais parle au milieu des pages
et me révèle à mon heure
le grand large et ma demeure.
Le silence évanescent s'élève jusqu'à la ramure
Où il accroche les chiffons de mes aubes disparues
pour effrayer les corbeaux
qui se posent sur la toiture
et abîment ma maison.